La croyance est une affirmation que nous pensons vraie : elle constitue le filtre à travers lequel nous voyons la réalité.
De la croyance collective à la croyance individuelle
« La croyance forte ne prouve que sa force, et non la vérité de ce qu’on croit »
Friedrich Nietzsche
Les avis divergent pour savoir qui, le premier, a émis l’hypothèse que la Terre était ronde. Ce qui est sûr en revanche, c’est que la croyance collective d’une Terre plate a, pendant longtemps, été une vérité que personne n’aurait osé remettre en question, sous peine de passer pour un fou. Puisque tout le monde le croyait, c’est que cela devait être vrai !
Selon l’époque à laquelle on naît, l’endroit où l’on se trouve et la société dans laquelle on vit, on ne voit évidemment pas le monde de la même façon. Chacun perçoit ce que l’on nomme « la réalité » avec les informations dont il dispose et lorsque nous construisons mentalement notre propre carte du monde, chaque aspect de « notre » réalité est conditionné par ce que nous croyons vrai.
Comment se construisent nos croyances ?
Quand on est enfant, les informations qui nous sont fournies proviennent de tous ceux qui détiennent l’autorité, à commencer par nos parents et nos professeurs. En clair : des personnes, qui ont elles-mêmes leurs propres croyances, et donc leur propre façon de voir le monde. Notre réalité se construit donc à travers le prisme de croyances multiples et multi-générationnelles. Viennent ensuite nos propres expériences, puis toutes les personnes qui croisent notre chemin, sans oublier les médias…
Une croyance peut être aidante, et peut nous pousser à donner le meilleur de nous même. Ainsi, croire que l’on peut atteindre un objectif difficile est essentiel pour effectivement l’atteindre. A contrario, une croyance peut être limitante, et si l’on ne fait rien pour s’en débarrasser, elle peut devenir un frein puissant, capable de parasiter notre relation aux autres, ou de nous bloquer lorsque l’on doit prendre une décision, faire un choix ou passer à l’action.
Pire, si les croyances limitantes ne sont pas remises en cause, elles peuvent se transmettre !
Prenons un exemple très simple : Théo, 6 ans, a peur des chiens, car il croit que tous les chiens sont dangereux. Cependant, il n’a jamais eu la moindre mésaventure impliquant un chien. Mais sa maman, Martine, lui répète, chaque fois qu’ils en croisent un dans la rue: « Attention, ne t’approche pas ! ». Elle-même n’a pourtant jamais eu d’expérience désagréable ou effrayante avec un chien. Mais quand elle était petite, sa maman lui répétait qu’il fallait se méfier des chiens car ils pouvaient être dangereux. Avait-elle, elle-même, connu une expérience effrayante ? Peut-être… Ou peut-être pas.
Le principe est le même pour toute situation de peur irrationnelle, donnant lieu à des généralisations, quel qu’en soit l’objet. Il peut s’agir de croyances sur nous-mêmes, sur les autres ou sur le monde.
Il est essentiel de savoir se délester de celles qui agissent sur nous comme des freins ou constituent des facteurs de stress, surtout lorsqu’elles ne nous appartiennent pas !
Comprendre le fonctionnement complexe de la croyance : la boucle auto-validante
« Nous sommes les forgerons de nos propres chaînes, et le plus souvent de très habiles artisans »
Jacques Salomé
Nous passons notre temps à valider inconsciemment nos croyances : cela nous rassure et rend « notre » monde plus stable. La croyance est une chose très complexe, car elle se nourrit d’elle-même. Elle nous pousse à agir de manière à ce que nous continuions à la valider : c’est ce que l’on appelle la boucle auto-validante.
Reprenons l’exemple de Martine et de sa peur des chiens. Elle croit que tous les chiens sont dangereux. Sans même s’en rendre compte, elle agit de manière à valider sa croyance, encore et encore. Ainsi, lorsqu’elle croise un chien dans la rue, aussi inoffensif et calme soit-il, elle manifeste sa peur en agissant de manière irrationnelle : elle s’agite et se met à crier. Mais ce faisant, il arrive qu’elle effraie l’animal, qui, détectant un comportement anormal et donc potentiellement dangereux pour lui, se met à aboyer ou se met à tirer sur sa laisse. Martine provoque donc le comportement qu’elle redoute, sans même se rendre compte qu’elle en est elle-même la cause. Jour après jour, elle se convainc que tous les chiens sont dangereux, puisque tous ceux qu’elle croise réagissent à son comportement à elle.
En pratique…
Dans un premier temps, nous devons donc faire la part des choses entre nos croyances aidantes (énergiques) et nos croyances limitantes (toxiques), afin de concentrer notre attention sur ces dernières, qu’il va falloir traiter.
Ensuite, il est essentiel de comprendre leur origine : pensons à certains souvenirs, anecdotes ou conversations qui nous ont marqué et faisons l’effort de nous interroger en faisant le lien avec les situations de blocage que nous vivons aujourd’hui. Interrogeons-nous : « qui m’a dit ceci ? », « qu’ai-je pu voir ou entendre qui me pousse à croire cela ? », …
Il peut s’agir :
- de la phrase blessante d’un professeur après une mauvaise note, comme « Tu n’es bon(ne) à rien… », « ton travail ne vaut rien… », etc…
- de la mise en garde d’un parent dont nous avons intégré une ou plusieurs croyances pendant notre construction psychique : « Le monde est dangereux… », « il ne faut faire confiance à personne… », etc…
- de la moquerie d’un frère, d’une soeur ou d’un camarade d’école : « Tu es trop grand / petit / gros / maigre / idiot / intello… », etc…
- d’une information choquante entendue au journal télévisé, répétée en boucles sur toutes les chaînes pendant plusieurs jours…
Une fois réalisé ce travail d’introspection, interrogeons-nous : « Au fond de moi, suis-je d’accord avec ça ? », « Objectivement, cela est-il avéré ? ».
Dans un second temps, nous devons apprendre à :
- garder en tête que chaque individu pense, parle et agit selon ses propres croyances, et ne détient pas la vérité absolue. Il ne détient que « sa » propre vérité. Cela aide à ne plus prendre pour argent comptant les remarques désobligeantes, et à relativiser critiques et paroles blessantes.
- prendre du recul par rapport à nos expériences de vie (un échec ponctuel pouvant être pris comme une règle) : la parade, c’est d’admettre enfin que les gens qui ont réussi des choses exceptionnelles ont, eux aussi, échoué à un moment donné, ou ont essayé plusieurs fois avant d’arriver à leurs fins. Leur succès n’est certainement que la partie immergée de l’iceberg, ce qu’ils ont choisi de montrer.
- prendre du recul par rapport aux médias : il est très difficile de trouver une approche objective des évènements, mieux vaut donc croiser différentes sources. Les médias veulent vendre du sensationnel et ne montrent que l’aspect négatif ou problématique des choses. Ils font plus volontiers l’impasse sur ce qui va bien, les possibilités, les améliorations, les progrès, les facilités, le confort et la sécurité qui nous sont offerts par le monde d’aujourd’hui, comparé à celui d’hier. Bien sûr, il ne s’agit pas de tomber dans un excès de candeur, mais de considérer les faits concrets plutôt que les faits ressentis.
Si nous ne faisons pas l’effort de remettre en question nos croyances limitantes dans le but de nous en débarrasser, elles se renforceront et continueront à définir, un peu plus chaque jour, notre réalité. Nous continuerons alors à voir le monde à travers leur filtre. Elle resteront un obstacle à toutes nos réalisations et nous empêcheront de révéler le meilleur de nous-même.
La seule façon de se débarrasser d’une croyance limitante : casser la boucle auto-validante
« La folie, c’est se comporter de la même manière et s’attendre à un résultat différent »
Albert Einstein
Maintenant que nous avons compris le fonctionnement de la boucle auto-validante, nous pouvons en casser le processus. Nous serons ainsi en mesure de nous délester de chacune de nos croyances limitantes.
Le principe est d’agir en changeant le comportement pour inverser le processus. Car en changeant le comportement, nous obtiendrons un résultat différent : la seule façon de « ramollir » notre croyance limitante, pour ensuite nous en débarrasser.
Retrouvons Martine, qui a peur des chiens. Elle a décidé de se débarrasser de sa croyance selon laquelle tous les chiens sont dangereux car elle ne veut plus vivre dans la peur d’une situation susceptible de se présenter au quotidien. Pour ce faire, elle s’est engagée envers son coach à faire l’effort de modifier son comportement la prochaine fois qu’elle croisera un chien.
Dès le lendemain, la situation tant redoutée se présente : sur le trottoir en face d’elle arrive une femme qui promène son berger allemand, tenu en laisse. Martine n’est pas rassurée, mais elle est décidée à respecter son engagement. Elle passe à côté du chien et de sa maîtresse, sans réagir. Il ne se passe strictement rien. Le chien, occupé à flairer une odeur, ne la remarque même pas. Martine réalise que son changement de comportement lui a permis d’éviter une situation qu’elle détestait. Elle se fait la promesse de recommencer la prochaine fois…
Ce changement, si infime soit-il, a deux avantages :
- jour après jour, sa croyance « ramollit » et la réalité de Martine évolue, l’incitant à appliquer ce principe de remise en question de ses propres comportements à d’autres situations de sa vie personnelle et professionnelle, notamment dans ses rapports aux autres.
- mais plus important encore, elle met fin à un schéma qui, autrement, aurait pu continuer à se perpétuer, évitant à son fils de porter un fardeau constitué de peurs dont il aurait été l’héritier.
Décider de remettre en cause nos croyances limitantes est un acte qui demande du courage et beaucoup de volonté mais dont la récompense n’a pas de prix.
En faisant cet effort, nous gagnons chaque jour un peu plus la liberté à laquelle nous aspirons tous.
Eric Nicloux